Écrire Un étudiant égyptien, prisonnier d’opinion et détenu au secret pendant 5 jours

Ahmed Samir Santawy Egypte

Comment AGIR facilement et rapidement ? Copier-coller le modèle de message ci-dessous dans la partie « J’agis » et envoyez-le aux emails des autorités égyptiennes m.office@ppo.gov.eg et eg.sec.be@hotmail.com. N’oubliez pas de mettre dans le sujet de l’email le nom de la personne en danger : Ahmed Samir Santawy.

Après son arrestation, le 1er février, Ahmed Samir Santawy, chercheur et étudiant en master, a été victime d’une disparition forcée pendant cinq jours.

Au cours de cette période, les forces de sécurité l’ont roué de coups et maintenu les yeux bandés, tout en l’interrogeant au sujet de sa présence sur les réseaux sociaux et de ses recherches. Le 6 février, le service du procureur général de la sûreté de l’État a ordonné son placement en détention jusqu’à la fin de l’enquête ouverte pour terrorisme.

Cet homme est privé de tout contact avec sa famille, ce qui suscite des inquiétudes quant à son bien-être et son état de santé, au vu des foyers de COVID-19 qui sont apparus dans les prisons surpeuplées et insalubres d’Égypte.

Il doit être libéré immédiatement et sans condition.

Ahmed Samir Santawy est chercheur et étudiant en anthropologie à l’université d’Europe centrale, à Vienne (Autriche). Ses recherches portent sur les droits des femmes, notamment l’histoire des droits reproductifs en Égypte. Depuis qu’il a commencé ses études dans cette université, d’abord à Budapest (Hongrie) en septembre 2019, des agents des forces de sécurité égyptiennes l’interrogent, à chaque fois qu’il arrive à l’aéroport international du Caire ou en repart, sur les motifs de ses voyages à l’étranger et la nature de ses études. Il a notamment été interrogé la dernière fois qu’il est entré sur le territoire égyptien, à la mi-décembre 2020.

D’après les informations contenues dans la plainte déposée par la famille d’Ahmed Samir Santawy devant le ministère public, qu’Amnesty International a pu consulter, et les renseignements collectés auprès d’autres sources fiables, sept policiers armés et encagoulés ont fait irruption au domicile de cet homme le 23 janvier, mais ce dernier ne s’y trouvait pas. Sans produire de mandat d’arrêt ni d’autorisation de perquisition, ils ont saisi un enregistrement numérique provenant des caméras de sécurité de la maison et ont ordonné qu’Ahmed Samir Santawy se présente à l’Agence de sécurité nationale, sans donner aucune justification. Le 30 janvier, lorsqu’il s’est rendu à l’Agence nationale de sécurité, installée dans un poste de police du Nouveau Caire, on lui a demandé de revenir un autre jour. C’est ce qu’il a fait le 1er février, et il a été arrêté. Le 3 février, il a été transféré dans un autre poste de police du Nouveau Caire. Le 4 février, les forces de sécurité l’ont emmené dans un lieu de détention inconnu, avant de le déférer au service du procureur de la sûreté de l’État le 6 février. Entre le moment où il s’est présenté, le 1er février, et son interrogatoire par ce service, les autorités ont refusé d’indiquer à sa famille et ses avocats ce qu’il était advenu de lui et où il se trouvait.

Le procureur général de la sûreté de l’État a interrogé Ahmed Samir Santawy au sujet de ses études et de son parcours universitaire, y compris les résultats de ses recherches sur l’islam et l’avortement. En outre, il lui a demandé explicitement quelles questions lui avaient été posées lors des interrogatoires à l’Agence de sécurité nationale. Ahmed Samir Santawy a déclaré avoir été interrogé au sujet de ses études et de ses interventions présumées sur une page Facebook intitulée « Révolutionnaires du 25 janvier », où étaient publiées des critiques quant au bilan des autorités en matière de droits humains ; il niait cependant avoir alimenté cette page. Le procureur lui a également posé des questions au sujet d’une publication sur Facebook qui dénonçait les coups qui auraient été assenés à un journaliste détenu, mais Ahmed Samir Santawy a nié être le titulaire du compte. Ses avocats ont demandé qu’il soit présenté aux services de médecine légale afin que les blessures qui lui avaient été infligées lorsqu’il était détenu par l’Agence de sécurité nationale soient examinées, mais leur requête a été rejetée.

Les autorités n’ont pas tenu compte des quelques garanties offertes par le droit égyptien ni respecté leurs obligations au regard du droit international. L’article 54 de la Constitution égyptienne dispose pourtant : « Toute personne dont la liberté est restreinte doit être immédiatement informée des motifs, [...] pouvoir contacter sans délai ses proches et son avocat et être déférée aux services chargés de l’instruction dans les 24 heures suivant le début de l’application de la privation de liberté. » Bien que l’article 40 de la Loi n° 94/2015 relative à la lutte contre le terrorisme autorise le ministère public ou tout autre « service chargé de l’instruction » à ordonner le placement en détention des suspects dans les affaires de terrorisme pour une durée maximale de 14 jours, renouvelable une fois, sans être contrôlé par un procureur ni un juge, les suspects ont le droit d’être informés des motifs de leur arrestation et de contacter leur famille et leur avocat (article 41). En outre, le droit égyptien impose de placer les suspects dans des lieux de détention officiels.

Aux termes des article 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Égypte est partie, personne ne doit être détenu arbitrairement et toute personne arrêtée a le droit d’être informée des motifs de son arrestation et doit être déférée rapidement à un juge et pouvoir contester la légalité de sa détention. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu qu’une détention, même lorsqu’elle est légale au titre du droit national, peut être arbitraire si elle va à l’encontre des normes internationales ou est incompatible avec d’autres droits humains comme les droits aux libertés d’expression, de réunion ou de conviction. L’Égypte est également partie à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui, à l’instar du PIDCP, interdit d’utiliser des éléments extorqués par la torture ou d’autres mauvais traitements.

Ces dernières années, des milliers d’opposant·e·s politiques, réels ou supposés, ont été arrêtés et maintenus en détention provisoire pendant de longues périodes sur ordre du service du procureur général de la sûreté de l’État, en attendant les conclusions d’enquêtes ouvertes pour des charges infondées, notamment liées au terrorisme, parfois pour une durée supérieure au maximum légal, fixé à deux ans.

Parmi les personnes visées figurent des défenseur·e·s des droits humains, des militant·e·s, des avocat·e·s, des personnalités politiques, des manifestant·e·s, des journalistes, des soignant·e·s et des universitaires. Les procédures dont elles font l’objet se fondent généralement sur des enquêtes policières secrètes, dont les défendeurs et leurs avocats ne sont pas autorisés à consulter les conclusions, et auxquelles s’ajoutent parfois des messages publiés sur les réseaux sociaux et considérés comme critiques à l’égard des autorités.

En février 2020, les forces de sécurité ont arrêté Patrick Zaki George, chercheur spécialisé dans les questions de genre et étudiant en master à Bologne (Italie), à son arrivée à l’aéroport international du Caire. Cet homme est toujours derrière les barreaux, en attendant les conclusions du SSSP quant à des charges similaires relatives au terrorisme.

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