Les procès des personnes jugées pour des infractions passibles de la peine de mort dans le cadre des manifestations nationales n’ont rien d’une véritable procédure judiciaire. Les autorités iraniennes s’appuient sur des « aveux » extorqués sous la torture et autres éléments de preuve obtenus en violation du droit international et des normes internationales pour prononcer des mises en accusation et des condamnations. Elles privent les accusés du droit de consulter un avocat lors de la phase d’enquête et empêchent les avocats désignés de manière indépendante de représenter leurs clients au tribunal et d’avoir accès aux dossiers. Le droit à la présomption d’innocence est régulièrement bafoué : les médias d’État ont en effet diffusé avant leur procès les « aveux » forcés de plusieurs accusés.
Les procédures sont accélérées, certaines condamnations à mort étant prononcées quelques jours seulement après l’ouverture du procès. Au moins sept personnes ont été condamnées à mort pour des infractions telles que vandalisme, agression et incendie volontaire, en violation du droit international, qui interdit l’usage de la peine capitale pour des infractions n’impliquant pas un homicide volontaire.
Amnesty International a recensé des actes de torture et autres mauvais traitements infligés à 10 des personnes citées ci-dessus dans le but de leur arracher des « aveux ». Il s’agit de Hamid Ghare-Hasanlou, Mohammad Ghobadlou, Sahand Nourmohammad-Zadeh, Shoeib Mir Baluchzehi Rigi, Ebrahim Narouie, Mansour Dahmardeh, Kambiz Kharout, Javad Rouhi, Mehdi Mohammadifard et Arshia Takdastan. Ils ont notamment été roués de coups, flagellés, soumis à des décharges électriques, soumis à des viols et d’autres formes de violence sexuelle, placés à l’isolement prolongé, menacés de mort et exposés à des froids extrêmes.
D’après des sources bien informées, Arshia Takdastan, Mehdi Mohammadifard et Javad Rouhi, condamnés à mort en décembre 2022, ont été soumis à d’horribles actes de torture et mauvais traitements. Mehdi Mohammadifard a été passé à tabac, suspendu la tête en bas et violé, ce qui a entraîné des blessures anales et des saignements rectaux qui ont nécessité son hospitalisation. Arshia Takdastan a été régulièrement frappé et menacé de mort avec une arme à feu pointée sur lui. Il a eu un orteil cassé et souffre de pertes de mémoire.
Javad Rouhi a été roué de coups et flagellé alors qu’il était attaché à un poteau, soumis à des décharges électriques, exposé à des températures glaciales, menacé de mort avec une arme à feu, et a subi des sévices sexuels consistant à lui mettre de la glace sur les testicules pendant deux jours. Suite à ces tortures, Javad Rouhi a souffert de douleurs à l’épaule et dans les muscles, d’incontinence urinaire, de complications digestives et de troubles de la mobilité et de la parole ; il ressent toujours de fortes douleurs au niveau du dos et des hanches, et un engourdissement de la jambe droite.
D’après des sources bien informées, les autorités ont torturé à maintes reprises Hamid Ghare-Hasanlou, qui attend son nouveau procès pour des infractions passibles de la peine de mort. Il a dû être hospitalisé pour des côtes cassées, des difficultés respiratoires et une hémorragie interne au poumon, qui ont nécessité trois interventions chirurgicales.
Au cours de son procès en première instance en décembre 2022, Hamid Ghare-Hasanlou a montré au juge ses blessures dues à la torture, mais celui-ci n’a pas ouvert d’enquête sur ses allégations. Une source bien informée a déclaré à Amnesty International que Mohammad Ghobadlou, dont la condamnation pour « corruption sur terre » et la sentence capitale ont été confirmées par la Cour suprême en décembre 2022, a été régulièrement frappé et privé de ses médicaments pour son trouble bipolaire.
À ce jour, les autorités ont exécuté arbitrairement quatre personnes en lien avec les manifestations, à l’issue de procès iniques entachés d’allégations de torture. Depuis le début du soulèvement populaire en septembre 2022, elles ont arrêté et inculpé des milliers de personnes, ce qui suscite des inquiétudes quant à l’application de la peine de mort à d’autres accusés.
Outre les personnes susmentionnées, Amnesty International a pu confirmer les noms de neuf autres – Toomaj Salehi, Farzad (Farzin) Tahazadeh, Farhad Tahazadeh, Karwan Shahiparvaneh, Reza Eslamdoost, Taher (Hajar) Hamidi, Shahram Marouf-Moula, Pouria Javaheri et Heshmatollah Tabarzadi – qui sont détenues et accusées ou déclarées coupables d’infractions passibles de la peine de mort, tandis que d’autres organisations en ont signalé des dizaines.
Deux d’entre elles sont accusées d’infractions passibles de la peine de mort en rapport avec des actes pacifiques protégés par le droit international. Le militant politique Heshmatollah Tabarzadi doit répondre de 20 chefs d’accusation, dont « corruption sur terre » (ifsad fil Arz), en raison de son militantisme pacifique et de ses critiques dans des entretiens avec les médias de la réponse des autorités aux manifestations.
Rapper Toomaj Salehi est notamment accusé de « corruption sur terre » (ifsad fil Arz), uniquement en raison de sa musique et de ses publications sur les réseaux sociaux dénonçant les pratiques iniques des autorités et réclamant liberté et respect des droits humains pour le peuple d’Iran.
D’après des sources bien informées, au moins six de ces neuf personnes – Toomaj Salehi, Farhad Tahazadeh, Karwan Shahiparvaneh, Reza Eslamdoust, Shahram Marouf-Moula et Heshmatollah Tabarzadi – ont subi des actes de torture et des mauvais traitements.