Le Maroc et la Belgique doivent prendre leurs responsabilités

Ali Aarrass a été extradé vers le Maroc par les autorités espagnoles en décembre 2010. Il y purge actuellement une peine de 12 ans de prison après avoir été déclaré coupable, au terme d’un procès inéquitable, d’avoir fait partie d’un groupe criminel. Après son extradition vers le Maroc, Ali Aarrass a déclaré avoir été maintenu au secret et torturé pendant 12 jours dans un centre de détention géré par la Direction générale de la surveillance du territoire. Le Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Juan Mendez, a conclu après une expertise médicale que les marques sur son corps étaient compatibles avec ses allégations. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a en outre déterminé qu’il avait été condamné à l’issue d’un procès inique s’appuyant sur des « aveux » obtenus sous la torture.

Des aveux obtenus sous la torture

L’an dernier, Ali Aarrass a observé une grève de la faim de 72 jours, dans le but de réclamer que les autorités marocaines le libèrent et de dénoncer l’absence de décision de la Cour de cassation, l’autorité suprême de la justice marocaine, plus de quatre ans après qu’il eut formé un recours devant cette instance qui a le pouvoir d’annuler ou de confirmer sa condamnation, ou d’ordonner un nouveau procès. En vertu de l’article 546 du Code de procédure pénale marocain, la Cour de cassation est tenue de statuer sur les pourvois formés par les détenus dans un délai maximum de trois mois à partir de la date de réception du dossier. Amnesty International demande aux autorités marocaines de veiller à ce que la Cour de cassation parvienne à une décision sur le cas d’Ali Aarrass dans les meilleurs délais.

Un procès inique

Les autorités marocaines doivent également exécuter la décision du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire leur demandant de libérer immédiatement Ali Aarrass et de lui accorder des réparations adaptées, a déclaré Amnesty International mardi 31 mai. Cela fait près de trois ans que l’organe des Nations unies a conclu que cet homme avait été déclaré coupable à l’issue d’un procès inique s’appuyant sur des « aveux » obtenus sous la torture.

Les autorités belges peuvent faire quelque chose

Les autorités belges n’ont quant à elles toujours pas fourni d’assistance consulaire à Ali Aarrass, qui la demande pourtant depuis des années. Elles ont refusé dans un premier temps, en invoquant sa double nationalité. Sommées par la cour d’appel de Bruxelles de s’exécuter en septembre 2014, elles ont demandé à plusieurs reprises aux autorités marocaines de leur accorder le droit de rendre visite à Ali Aarrass, mais affirment qu’elles n’ont toujours pas reçu de réponse. Dans le même temps, cependant, les autorités belges ont formé un recours auprès de la Cour de cassation belge contre le jugement de la cour d’appel. Le ministre belge des Affaires Étrangères, Didier Reynders, focalise de plus en plus l’attention sur les charges de terrorisme contre Ali Aarrass dans les médias et au Parlement. En mars 2016, il a annoncé que Ali Aarrass bénéficiait déjà d’une assistance consulaire, ce qui n’est pas le cas, et que rien n’indiquait qu’il avait été torturé par les services de renseignement marocain. Avec ces propos, Didier Reynders n’a pas seulement rejeté les allégations d’Ali Aarrass, mais aussi les conclusions et les demandes de l’ONU et d’Amnesty International.

Que pouvez-vous faire ?

Signez notre pétition adressée aux autorités marocaines et belges pour qu’elles prennent enfin leurs responsabilités.

En mai 2014, deux jours après que le Comité des Nations unies contre la torture a estimé que le Maroc avait enfreint la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les autorités marocaines ont annoncé qu’elles ouvraient une enquête sur les allégations de torture formulées par Ali Aarrass. À la fin de l’année 2015, les avocats d’Ali Aarrass ont été informés que l’enquête était close. En février 2016, le Conseil international de réadaptation pour les victimes de la torture a déterminé que le deuxième examen médicolégal effectué sur Ali Aarrass, dans le cadre d’une enquête sur ses allégations de torture en novembre 2014, n’avait pas respecté certaines consignes essentielles du Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul).

En septembre 2014, Amnesty International a remis au ministre marocain de la Justice et des Libertés une pétition ayant recueilli 216 500 signatures dans le monde, lui demandant d’exécuter la décision du Groupe de travail sur la détention arbitraire et de mener une enquête impartiale et indépendante sur les actes de torture qu’Ali Aarrass dit avoir subis. En décembre 2015, à l’occasion du cinquième anniversaire de son renvoi forcé vers le Maroc, Ali Aarrass a remercié dans une lettre rendue publique toutes les personnes qui lui ont écrit, pour lui avoir donné de la force et de l’espoir de manière ininterrompue.

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