« La répression persistante exercée contre Amnesty International Inde depuis deux ans et le gel total de ses comptes bancaires ne sont pas fortuits. Le harcèlement exercé constamment par les agences gouvernementales, notamment par la Direction de l’application de la loi résulte de nos appels sans équivoque en faveur de la transparence concernant le gouvernement, et plus récemment en faveur du respect, par la police de Delhi et le gouvernement indien, de l’obligation de rendre des comptes pour les graves violations des droits humains commises lors des émeutes à Delhi et dans l’État de Jammu-et-Cachemire. Le mouvement n’a fait que dénoncer haut et fort des injustices, et cette dernière attaque en date revient à paralyser les voix dissidentes », a déclaré Avinash Kumar, directeur d’Amnesty International Inde.
Amnesty International Inde se conforme pourtant pleinement à toutes les dispositions du droit national et international. Pour son travail de défense des droits humains en Inde, elle opère selon un type particulier de levée de fonds au niveau national. Plus de quatre millions de personnes en Inde ont soutenu son travail ces huit dernières années, et environ 100 000 y ont contribué financièrement. Ces contributions n’ont évidemment rien à voir avec la Loi de 2010 relative la règlementation des contributions étrangères. Le fait que le gouvernement qualifie maintenant ce système légal de levée de fonds de blanchiment d’argent met en évidence un recours malveillant à des dispositions légales trop imprécises quand des militant·e·s et des organisations œuvrant pour la défense des droits humains dénoncent la grave inaction et les excès alarmants du gouvernement.
« La répression persistante exercée contre Amnesty International Inde depuis deux ans et le gel total de ses comptes bancaires ne sont pas fortuits. Le harcèlement exercé constamment par les agences gouvernementales, notamment par la Direction de l’application de la loi résulte de nos appels sans équivoque en faveur de la transparence concernant le gouvernement, et plus récemment en faveur du respect, par la police de Delhi et le gouvernement indien, de l’obligation de rendre des comptes pour les graves violations des droits humains commises lors des émeutes à Delhi et dans l’État de Jammu-et-Cachemire. Le mouvement n’a fait que dénoncer haut et fort des injustices, et cette dernière attaque en date revient à paralyser les voix dissidentes »
Les attaques contre Amnesty International Inde et d’autres organisations de défense des droits humains, militant·e·s et défenseur·e·s des droits humains n’est que le prolongement des diverses politiques répressives et des hostilités persistantes engagées par le gouvernement contre celles et ceux qui disent la vérité au pouvoir.
« En traitant les mouvements de défense des droits humains comme des organisations criminelles et les dissident·e·s comme des criminels sans disposer d’aucune preuve crédible, la Direction de l’application de la loi et le gouvernement indien cherchent à alimenter un climat de peur et à museler les voix critiques en Inde. Ces agissements empestent la peur et la répression, ne tiennent aucun compte du coût humain de cette répression en particulier en période de pandémie, et violent les droits fondamentaux à la liberté de parole et d’expression, de réunion et d’association pourtant garantis par la Constitution indienne et le droit international relatif aux droits humains. En tant que puissance mondiale et membre du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, l’Inde devrait bien au contraire entendre sans crainte les appels en faveur du respect de l’obligation de rendre des comptes et de la justice », a déclaré Avinash Kumar.
Membre d’un mouvement qui a remporté le prix Nobel de la paix, Amnesty International Inde se soumet aux normes les plus strictes en matière de preuves. Le travail que nous accomplissons en Inde, et partout ailleurs, consiste à faire respecter les droits humains universels et à bâtir un mouvement mondial composé de personnes qui se sentent concernées personnellement par l’injustice. Ces mêmes valeurs sont inscrites dans la Constitution indienne et découlent d’une longue et riche tradition indienne de pluralisme, de tolérance et d’opposition pacifique.
Complément d’information
Chronologie des attaques et manœuvres de harcèlement ayant visé Amnesty International Inde
Le 25 octobre 2018, Amnesty Inde a subi pendant 10 heures une perquisition menée par des agents de la Direction de l’application de la loi (Enforcement Directorate, ED), un organe d’investigations financières du ministère des Finances, qui ont verrouillé les portes après être entrés dans les locaux. La plupart des informations et documents qui ont été réclamés au cours de cette perquisition avaient déjà été rendus publics ou communiqués aux autorités gouvernementales concernées. Une perquisition a également été menée au domicile d’un membre de la direction.
Immédiatement après cette opération, les comptes bancaires ont été gelés par l’ED. En conséquence, Amnesty International Inde a été contrainte de se séparer d’une partie de son personnel, ce qui a eu des incidences négatives sur le travail mené en Inde, notamment en faveur des communautés marginalisées. Malgré les investigations en cours et avant toute inculpation, le gouvernement indien a lancé une campagne de diffamation contre Amnesty International Inde dans le pays en divulguant de façon sélective des documents réunis par l’ED, qui ont été communiqués à des médias proches du gouvernement. Cela a donné lieu à un procès médiatique malveillant contre l’organisation.
Début 2019, le ministère de l’Impôt sur le revenu a commencé à envoyer des courriers inquisiteurs à plus de 30 personnes faisant régulièrement de petits dons. Apparemment, le ministère n’a découvert aucune irrégularité, mais cette manœuvre a eu des répercussions négatives sur les campagnes de collecte de fonds d’Amnesty International Inde.
En juin 2019, Amnesty International Inde s’est vu refuser l’autorisation de tenir une conférence de presse à Srinagar pour le lancement de son troisième rapport intitulé Lawless Law portant sur le recours abusif à la Loi relative à la sécurité publique dans l’État de Jammu-et-Cachemire. Elle a été contrainte de le rendre public de façon numérique.
Le 22 octobre 2019, Amnesty International a témoigné devant le Congrès des États-Unis lors d’une audition consacrée à la situation des droits humains en Asie du Sud et plus particulièrement dans l’État de Jammu-et-Cachemire depuis l’abrogation unilatérale de l’article 370 de la Constitution indienne.
Le 15 novembre 2019, deux semaines après cette audition et alors que des rumeurs circulaient au sujet de l’arrestation imminente de hauts responsables de l’organisation, les locaux d’Amnesty International Inde et le domicile d’un membre de sa direction ont de nouveau été perquisitionnés par le CBI. Ces opérations ont été menées sur la base d’une plainte déposée par le ministère de l’Intérieur concernant des allégations sans fondement relatives à des violations présumées de la Loi sur la règlementation des contributions étrangères. Elle proposait qu’une enquête fût menée au titre de lois telles que la Loi relative à la prévention du blanchiment d’argent.
Le 13 avril 2020, Amnesty International Inde a demandé au gouvernement de l’Uttar Pradesh de cesser d’intimider les journalistes en recourant à des lois répressives pendant la pandémie. Le 15 avril 2020, le service de la police chargé de la cybercriminalité, à Lucknow, dans l’Uttar Pradesh, a demandé à Twitter de fournir des informations sur le compte Twitter d’Amnesty International Inde @AIIndia, que l’organisation utilise pour surveiller et examiner les nouveaux éléments dans le droit international relatif aux droits humains et la Constitution et le droit pénal indiens relatifs aux droits humains.
Le 5 août 2020, à l’occasion du premier anniversaire de l’abrogation de l’article 370 de la Constitution indienne, Amnesty International Inde a rendu public un rapport présentant des informations mises à jour sur la situation des droits humains dans l’État de Jammu-et-Cachemire.
Le 28 août 2020, six mois après les émeutes qui avaient eu lieu dans le nord-est de Delhi en février 2020, Amnesty International Inde a publié un rapport sur la complicité de la police de Delhi dans les émeutes au cours desquelles au moins 53 personnes, appartenant principalement à la minorité musulmane, ont perdu la vie.
La publication de ces deux documents a fourni aux autorités une nouvelle occasion de harceler et d’intimider Amnesty International Inde au moyen de ses agences d’enquête.
Le 10 septembre 2020, Amnesty International Inde a eu connaissance du fait que tous ses comptes bancaires étaient totalement gelés par l’ED, ce qui avait pour effet de paralyser la plupart des activités de l’organisation de défense des droits humains.