Ce rapport, intitulé Desprotegidas en Ecuador : Mujeres venezolanas refugiadas y sobrevivientes de violencia basada en género (voir aussi le faits et chiffres consacré à l’Équateur) révèle qu’en Équateur également, ces femmes sont confrontées à une violence omniprésente et à un État incapable de garantir, protéger et respecter leur droit à une vie sans violence.
« Il est préoccupant de constater que l’Équateur, en tant qu’État, s’aligne sur la Colombie et le Pérou en ce qui concerne le traitement inacceptable infligé aux femmes vénézuéliennes victimes de violences liées au genre. L’Équateur, qui se place au troisième rang des pays qui accueillent des personnes fuyant les violations massives des droits humains commises au Venezuela, doit remédier de toute urgence au manque de protection des femmes vénézuéliennes », a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
Avec un total de 502 214 personnes [1] enregistrées dans le pays en août 2022, l’Équateur est, avec la Colombie et le Pérou, l’un des principaux pays qui accueillent des personnes réfugiées vénézuéliennes ; la Colombie et le Pérou ont en effet accueilli 2,5 et 1,5 millions de personnes vénézuéliennes respectivement. Le total global ne cesse d’augmenter et il dépasse déjà les 7,1 millions de personnes, mais en parallèle, on constate aussi un accroissement du nombre de pays qui restreignent l’entrée sur leur territoire et la protection accordée, comme par exemple dans le cas des États-Unis.
En Équateur, les femmes et les filles représentent environ la moitié de ce demi-million de personnes et la majorité d’entre elles sont en situation migratoire irrégulière. Amnesty International considère que les personnes vénézuéliennes qui ont quitté leur pays à cause des violations des droits humains qui y sont commises massivement ont besoin d’une protection internationale et qu’elles doivent être reconnues en tant que personnes réfugiées. Quelle que soit leur situation migratoire dans le pays, l’organisation les considère comme des personnes réfugiées.
Les droits des femmes vénézuéliennes en Equateur
Les recherches montrent que l’État équatorien ne garantit pas le droit des Vénézuéliennes de demander une protection en tant que réfugiées, ni leur droit à une vie sans violence. En ce qui concerne la protection liée au statut de personne réfugiée, les autorités équatoriennes ne garantissent pas le droit de demander la reconnaissance de la situation de personne réfugiée pour les femmes vénézuéliennes. Alors que l’article 98 de la Loi organique sur la mobilité humaine comprend la définition que donne la Déclaration de Carthagène de 1984 de la personne réfugiée, les autorités équatoriennes se conforment rarement à cette définition. Entre 2018 et 2022, 555 femmes seulement ont formellement obtenu le statut de personne réfugiée, et certaines femmes ont signalé que les autorités les avaient dissuadées de demander une protection internationale. Compte tenu des obstacles importants qui les empêchent d’accéder aux autres mécanismes de régularisation de leur situation migratoire, les femmes vénézuéliennes continuent d’être fortement exposées au risque de subir des violences et une discrimination en raison de leur situation migratoire irrégulière.
En ce qui concerne le fait que le droit des femmes vénézuéliennes à une vie sans violence n’est pas garanti, le rapport souligne que la violence fondée sur le genre constitue une problématique systémique et fréquente en Équateur : deux femmes sur trois [2] subissent une forme ou une autre de violence fondée sur le genre au cours de leur vie. Dans un tel contexte, les femmes vénézuéliennes réfugiées sont tout particulièrement exposées au risque de subir des violences physiques, sexuelles, patrimoniales, gynéco-obstétriques et cybernétiques dans les sphères publique et privée, sur leur route migratoire ou sur leur lieu de destination. Cette vulnérabilité à la violence est encore accrue pour les femmes en situation migratoire irrégulière, ce qui est le cas de la plupart des femmes vénézuéliennes qui se trouvent en Équateur, et nombre d’entre elles ne dénoncent pas les violences liées au genre qu’elles subissent par crainte d’être expulsées du pays ou de se voir infliger une amende.
Amnesty International a constaté des problèmes structurels au niveau des services qui se trouvent en première ligne pour l’identification des cas de violence fondée sur le genre et la mise en œuvre de mesures visant à y faire face, comme par exemple le système équatorien d’administration de la justice. Les préjugés, la discrimination fondée sur le genre et la xénophobie dont font l’objet les femmes vénézuéliennes, le manque de ressources et l’absence d’institutionnalisation des bonnes pratiques contribuent à un manque d’accès à des mécanismes de protection et au système judiciaire. L’ensemble de ces facteurs crée une situation où l’accès à la justice et à des réparations pour les femmes vénézuéliennes demeure utopique dans la pratique, ce qui viole leur droit à une vie libre de toute violence.
« Plus de 7,1 millions [3] de personnes ont fui la crise sans précédent qui sévit au Venezuela depuis quelques années. L’Équateur, la Colombie, le Pérou et les autres pays qui reçoivent des personnes vénézuéliennes en quête d’une protection internationale se doivent de mettre en place de toute urgence une action coordonnée garantissant leurs droits fondamentaux. La protection des filles et des femmes, notamment des victimes de violences fondées sur le genre, doit toujours être une priorité pour tous les États, et nous continuerons de demander qu’il en soit ainsi, a déclaré Erika Guevara Rosas.
Les informations présentées dans le rapport résultent d’un travail d’enquête réalisé de juin à septembre 2022, notamment d’un travail de terrain dans les villes de Huaquillas, Machala et Quito en août et septembre. Nous avons mené au total, pour les besoins de cette enquête, des entretiens avec 99 personnes, dont 63 femmes victimes de violences liées au genre, 19 représentant·e·s d’organisations de la société civile, sept représentant·e·s d’organisations internationales et 10 représentant·e·s d’entités gouvernementales. De plus, Amnesty International a déposé 10 demandes d’accès à l’information publique et examiné de façon exhaustive la législation en vigueur, les politiques publiques, ainsi que la littérature et les articles de presse sur le sujet.