Israël et TPO, un membre du personnel d’Amnesty interdit de circuler librement

La décision des autorités israéliennes d’empêcher un membre du personnel d’Amnesty International de se rendre à l’étranger au prétexte de « raisons de sécurité », une sanction manifeste contre l’action de l’organisation en faveur des droits humains, est un nouvel exemple glaçant de l’intolérance croissante d’Israël à l’égard des voix critiques.

Laith Abu Zeyad, chargé d’action sur Israël et territoires palestiniens occupés à Amnesty International, a été intercepté le 26 octobre au point de passage Allenby/roi Hussein, entre la Jordanie et la Cisjordanie occupée par Israël, alors qu’il se rendait aux funérailles d’un parent. Il a dû attendre pendant quatre heures avant qu’on ne l’informe que le service israélien de renseignement lui interdisait de voyager pour des « raisons de sécurité » confidentielles.
 
« L’affirmation des autorités israéliennes selon laquelle certaines raisons de sécurité justifient l’interdiction de voyager frappant Laith Abu Zeyad est totalement absurde. Leur incapacité à fournir des détails qui prouveraient la nécessité de l’interdiction révèle le véritable objectif de celle-ci. Il s’agit d’une sinistre manœuvre visant à le punir pour son travail de défense des droits fondamentaux des Palestinien·ne·s », a déclaré Kumi Naidoo, secrétaire général d’Amnesty International.
 

« Outre le fait qu’elle porte atteinte au droit de Laith de circuler librement et à son droit à la liberté d’association, cette interdiction illustre une nouvelle fois la détermination implacable des autorités israéliennes à réduire au silence les organisation de défense des droits humains et les militant·e·s qui critiquent le gouvernement. Elle met également en évidence la cruauté et le manque d’humanité de leurs politiques. »
 
Laith Abu Zeyad s’est précédemment vu refuser un permis de séjour humanitaire qui lui aurait permis de se rendre en Israël depuis la Cisjordanie occupée en septembre, afin d’accompagner sa mère à une séance de chimiothérapie à Jérusalem. Le régime des permis [1] contraint l’ensemble des résident·e·s palestiniens des territoires occupés à obtenir un permis afin de se rendre en Israël, y compris à Jérusalem-Est, pour quelque raison que ce soit - professionnelle, médicale, familiale ou autre.
 
Non seulement ces restrictions arbitraires à son droit de circuler portent cruellement atteinte à sa vie de famille, mais elles interfèrent en outre avec son travail en faveur des droits humains, car elles l’empêchent de se rendre à Jérusalem-Est et en Israël, ou de voyager à l’étranger pour certaines activités essentielles, comme le fait de mener un travail de plaidoyer aux Nations unies et avec d’autres organisations internationales, ou de participer à des conférences et d’autres événements.
 
«  Les autorités israéliennes doivent immédiatement lever les interdictions arbitraires de circuler visant Laith Abu Zeyad et d’autres défenseur·e·s palestiniens des droits humains, qui sont sanctionnés pour avoir osé dénoncer les violations des droits humains et discriminations systématiques infligées par Israël aux Palestinien·ne·s  », a déclaré Kumi Naidoo.
 

Il est établi qu’Israël recourt à des interdictions arbitraires de circuler afin de harceler et d’intimider des défenseur·e·s des droits humains et des militant·e·s pacifiques. Omar Barghouti, co-fondateur du mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions, a fait l’objet de plusieurs interdictions arbitraires de circuler librement depuis 2016. Shawan Jabarin, directeur d’al Haq, une organisation de défense des droits des Palestiniens, est lui aussi visé par une interdiction arbitraire de circuler librement, qui n’est rien d’autre qu’une mesure punitive.
 
Selon les normes internationales relatives aux droits humains, les restrictions au droit de circuler librement doivent rester exceptionnelles, avoir un but légitime, être proportionnées et avoir des motifs juridiques précis. Les raisons de l’interdiction doivent être claires, et il doit être possible de la contester.

Le refus des autorités israéliennes de présenter le moindre élément étayant l’interdiction de circuler signifie que Laith Abu Zeyad est privé de toute véritable possibilité de contester cette décision devant la justice.
 
Complément d’information

Laith Abu Zeyad s’est vu accorder trois permis lui permettant de se rendre en Israël, d’une durée de six mois chacun, depuis qu’il a commencé à travailler avec Amnesty International en novembre 2017. Le dernier de ces trois permis était valide du 20 novembre 2018 au 12 mai 2019.
 
Le 8 septembre 2019, Laith Abu Zeyad a déposé une demande de permis humanitaire au poste de contrôle militaire d’al Zaytoona (Hazatem) afin de pouvoir accompagner sa mère qui devait recevoir des soins médicaux à Jérusalem. Sa demande a été rejetée le jour même pour des « raisons de sécurité », sans aucune autre explication.
 
Le 13 juin 2018, Laith Abu Zeyad a fait partie d’un groupe de personnes arrêtées de manière arbitraire et torturées par les forces palestiniennes de sécurité, après que ces dernières ont réprimé une manifestation organisée par des militant·e·s palestiniens à Ramallah qui réclamaient la levée par les autorités palestiniennes établies à Ramallah des sanctions imposées dans la bande de Gaza, administrée par le Hamas. Il a été appréhendé et agressé par deux membres des forces de sécurité vêtus en civil alors qu’il se rendait à la manifestation en qualité d’observateur.
 
Ces dernières années, les autorités israéliennes ont intensifié les actes d’intimidation visant les organisations de la société civile et leurs personnels en Israël et territoires palestiniens occupés. La société civile se trouve constamment en butte aux attaques, en raison de lois et politiques gouvernementales restrictives couplées à des campagnes de diffamation ayant pour but de discréditer leur travail en faveur des droits humains. En septembre, les forces israéliennes ont effectué une descente dans les locaux de l’Association Addameer de soutien aux détenus et de protection de leurs droits, une organisation palestinienne de défense des droits humains. La Cour suprême israélienne a par ailleurs examiné le recours formé contre la décision du gouvernement de révoquer le permis de travail d’Omar Shakir directeur de Human Rights Watch pour Israël et la Palestine, ce qui a au bout du compte mené à son expulsion. 

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