Malaisie, 1 086 personnes renvoyées au Myanmar, au mépris d’une décision de justice

Malaisie Rohingyas

Mardi 23 février, 1 086 personnes ont été expulsées vers le Myanmar par les autorités malaisiennes.

« La décision du gouvernement malaisien de renvoyer ces personnes en faisant fi d’une décision rendue le jour même par la haute cour de Kuala-Lumpur est inhumaine et accablante. Nous pensions qu’avec une décision de justice, elles seraient en sécurité. Nous sommes donc choqués que les autorités aient procédé à leur expulsion », a déclaré la directrice d’Amnesty International Malaisie, Katrina Jorene Maliamauv.

« Il semble que les autorités aient fait passer en force cette expulsion incroyablement cruelle avant tout examen de la décision, en dépit des multiples appels à évaluer véritablement la situation des personnes concernées.

« L’argument avancé par les autorités, selon lequel aucun demandeur d’asile ne se trouvait parmi elles, était manifestement faux. Des doutes sérieux et préoccupants persistent quant au statut migratoire des personnes renvoyées au Myanmar aujourd’hui.

« Il semble que les autorités aient fait passer en force cette expulsion incroyablement cruelle avant tout examen de la décision, en dépit des multiples appels à évaluer véritablement la situation des personnes concernées »

« Le fait que le HCR n’ait pas eu la possibilité d’accéder à ce groupe est consternant – tout comme celui qu’il soit privé d’accès aux centres de détention des services de l’immigration depuis août 2019.

« Les autorités affirment que les personnes expulsées ont accepté de retourner dans leur pays volontairement, mais celles-ci ont dû choisir entre la détention illimitée ou un retour vers une situation extrêmement instable liée au coup d’État au Myanmar. Le recours à des moyens indirects pour contraindre des personnes à retourner dans un endroit où elles risquent de graves atteintes aux droits humains constitue de fait un refoulement implicite, ou départ provoqué.

« Cette décision dangereuse a bouleversé la vie de plus d’un millier de personnes, dont des familles, et laisse une tache indélébile sur le bilan de la Malaisie en matière de droits humains, qui s’était déjà fortement détérioré au cours de l’année passée.

« L’audience prévue mercredi 24 février, qui se tiendra malgré tout, doit apporter des réponses sur ce qui s’est passé. Un événement tel que l’expulsion d’aujourd’hui – qui s’est déroulée secrètement et sans accès des Nations unies aux personnes vulnérables – ne doit plus jamais être rendu possible. Nous exhortons les autorités malaisiennes à respecter leurs obligations découlant du droit international relatif aux droits humains et à garantir un rapatriement sûr et volontaire des personnes, en permettant au HCR d’accéder aux personnes expulsées pour évaluer leur situation.

« Cette décision dangereuse a bouleversé la vie de plus d’un millier de personnes, dont des familles, et laisse une tache indélébile sur le bilan de la Malaisie en matière de droits humains »

« Les autorités doivent rétablir l’accès des Nations unies aux centres de détention et leur permettre d’effectuer leur travail vital. La détention aux seules fins de contrôle de l’immigration ne doit pas continuer et le gouvernement doit s’efforcer de libérer toutes les personnes détenues pour ce motif. Les personnes réfugiées et demandeuses d’asile cherchant un lieu sûr doivent être autorisés à solliciter une protection dans un pays comme la Malaisie. Nous ne pouvons pas continuer de nier l’humanité fondamentale des personnes qui arrivent sur nos côtes en quête de travail ou de sécurité. »

Complément d’information

Le 23 février 2021, les autorités malaisiennes ont renvoyé 1 086 ressortissants du Myanmar dans leur pays. Auparavant, le directeur général des services de l’immigration, Khairul Dzaimee Daud, avait déclaré que l’expulsion concernerait des personnes ayant enfreint la Loi n° 1959/63 sur l’immigration et le Règlement n°1963 relatif à l’immigration, notamment en n’ayant pas de papiers d’identité sur elles, en restant sur le territoire au-delà de la période de validité de leur visa et en utilisant à mauvais escient des permis de séjour.

Quelques heures avant l’expulsion, un juge de la haute cour de Kuala-Lumpur avait prononcé une suspension de l’ordre d’expulsion pour une journée, le temps d’étudier une demande de réexamen judiciaire déposée par Amnesty International Malaisie et Asylum Access Malaisie.

Cette procédure visait à obtenir une décision de justice pour empêcher l’expulsion. Le dossier comportait les noms et coordonnées de trois personnes détentrices d’une carte du Haut- Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et de 17 mineurs ayant au moins un parent en Malaisie. L’expulsion des ressortissants du Myanmar a eu lieu avant une audience consacrée au réexamen judiciaire qui était prévue le 24 février 2021, si bien que les autorités ont pris le risque de commettre un outrage à l’autorité de la justice.

À l’approche de l’expulsion, le HCR a déclaré qu’au moins trois personnes enregistrées auprès de lui figuraient parmi celles risquant d’être expulsées, et exprimé sa crainte qu’il n’y ait d’autres personnes dans une situation similaire dans le groupe. Le HCR est privé d’accès aux centres de détention des services de l’immigration malaisiens depuis août 2019.

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