« Une nouvelle fois, le Bureau du procureur démontre qu’il abandonne lentement les victimes et les survivants du conflit qui fait rage dans le nord-est du Nigeria. Au lieu d’enquêter sur les atrocités commises, les rares visites du Bureau du procureur au Nigeria se résument principalement à des rencontres avec les autorités nationales, a déclaré Isa Sanusi, directeur d’Amnesty International Nigeria.
« Il y a 10 ans ce mois-ci, l’armée nigériane a massacré au moins 640 hommes et garçons qui avaient fui la caserne militaire de Giwa à Maiduguri, dans l’État de Borno, à la suite d’une attaque de Boko Haram. Ce terrible anniversaire s’accompagne aujourd’hui d’une déclaration du Bureau du procureur selon laquelle les victimes doivent continuer de patienter avant d’obtenir justice.
« En décembre 2020, la procureure de la CPI était parvenue à la décision qu’une enquête au Nigéria était justifiée, au motif que les autorités nigérianes ne voulaient ou ne pouvaient pas enquêter dûment sur les nombreux crimes commis dans le nord-est du pays par des membres de Boko Haram et des forces de sécurité nigérianes, ni engager des poursuites à leur encontre. Malgré cette décision prise en 2020, le Bureau du Procureur n’a toujours pas pris de mesures officielles pour ouvrir une enquête.
« À la lumière de la décision qu’il a prise en 2020, la déclaration faite hier ne fait que confirmer le mépris du Bureau du Procureur vis-à-vis de son obligation légale d’enquêter, lorsque les États ne le font pas. Elle démontre également la vacuité de son engagement envers les victimes nigérianes, auxquelles, comment l’ignorer, il n’a pas rendu visite dans le nord-est du pays. »
Complément d’information
Du 19 au 22 mars 2024, le Bureau du procureur s’est rendu à Abuja, au Nigeria. Au lendemain de cette mission, il a publié une déclaration [1] qui ne précise aucune mise à jour de la situation vis-à-vis de la Cour pénale internationale (CPI).
Le groupe armé Boko Haram et les forces de sécurité nigérianes commettent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité dans le nord-est du Nigeria depuis 2009. Amnesty International a recueilli des informations sur nombre de ces crimes, notamment le massacre de la caserne de Giwa en mars 2014 [2].
Le 11 décembre 2020, après 10 années d’enquête préliminaire, l’ex-procureur de la CPI a clos l’examen préliminaire consacré au Nigeria [3] concluant que des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avaient été commis et que les autorités nigérianes n’avaient pas dûment enquêté sur ces faits ni engagé de poursuites, ce qui justifiait que la CPI mène une investigation complète. Depuis cette décision, le Bureau du procureur n’a toujours pas sollicité l’ouverture d’une enquête.