Algérie, Depuis deux ans, les militants du Hirak sont en butte à la répression

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Les autorités algériennes se sont attaquées à des dizaines de manifestants, journalistes et militants à coups d’arrestations arbitraires et de poursuites judiciaires, au motif qu’ils ont manifesté pacifiquement et exprimé des opinions politiques sur les réseaux sociaux, écrit Amnesty International dans une déclaration publiée le 22 février 2021, à l’occasion du deuxième anniversaire des contestations du Hirak.

Dans une investigation menée sur 73 cas de militant·e·s du Hirak, manifestant·e·s et journalistes, Amnesty International a constaté qu’au cours des deux dernières années, les autorités ont eu recours à des arrestations arbitraires, à des poursuites et parfois à des condamnations à de lourdes peines de prison sur la base de dispositions floues du Code pénal. Certains militant·e·s ont vu leurs téléphones fouillés de manière intrusive, d’autres ont été licenciés par leur employeur parce qu’ils avaient été inculpés. Certains ont signalé avoir subi des actes de torture et des mauvais traitements durant leur détention.

Le 18 février, dans un discours à la nation, le président Abdelmadjid Tebboune a annoncé des élections législatives anticipées et déclaré qu’il avait ordonné la libération de dizaines de manifestant·e·s détenus ou poursuivis pour avoir participé au mouvement de contestation du Hirak ou pour des publications sur les réseaux sociaux. Au moins 37 ont été libérés les 19 et 20 février, mais 31 restent toujours en prison, selon le Comité national pour la libération des détenus, un groupe d’observation local.

Parmi les personnes qui ont été relâchées, figure Khaled Drareni, qui avait été condamné à deux ans de prison pour sa couverture du Hirak, et dont le cas faisait partie du Marathon des lettres d’Amnesty International.

Voir aussi : Marathon des lettres

« Les conclusions d’Amnesty International pointent vers une stratégie délibérée des autorités algériennes visant à écraser la dissidence, stratégie qui vient contredire leurs promesses en matière de respect des droits humains. Ces actions sont celles d’un gouvernement désireux de censurer son peuple parce qu’il manifeste sans violence et exprime des opinions critiques sur les réseaux sociaux. Ces méthodes répressives n’ont pas leur place dans une société respectueuse des droits », a déclaré Amna Guellali, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Amnesty International.

« De nombreuses personnes graciées par le président Abdelmadjid Tebboune ces derniers jours sont des manifestant·e·s pacifiques qui n’ont fait qu’exercer leurs droits à la liberté d’expression et de réunion et n’auraient donc jamais dû être arrêtés.

« Les conclusions d’Amnesty International pointent vers une stratégie délibérée des autorités algériennes visant à écraser la dissidence, stratégie qui vient contredire leurs promesses en matière de respect des droits humains »

« Le gouvernement algérien doit libérer immédiatement et sans condition tous les autres manifestant·e·s pacifiques, militant·e·s et journalistes qui font l’objet de poursuites ou sont incarcérés pour avoir manifesté ou exprimé leurs opinions pacifiquement, et doit abandonner toutes les charges retenues contre eux. Enfin, nous invitons les autorités algériennes à modifier ou abroger les articles de loi qui piétinent les droits à la liberté d’expression, en ligne comme hors ligne, et de réunion pacifique. »

Les principales conclusions d’Amnesty International sont :

  • Au cours de ces deux années, au moins 73 personnes ont été la cible d’arrestations arbitraires, de poursuites et, dans certains cas, de lourdes peines de prison fondées sur des dispositions du Code pénal formulées en termes vagues : « atteinte » à la sécurité nationale ou à l’intérêt national, « outrage » envers des fonctionnaires et « incitation » à un attroupement non armé ;
  • Les lois récemment adoptées qui criminalisent la diffusion de fausses informations ou le non-respect des mesures de confinement en cette période d’urgence sanitaire ont été invoquées pour intenter des poursuites contre plusieurs militant·e·s qui avaient appelé à reprendre la contestation ou avaient critiqué la gestion de la pandémie de COVID-19 par les autorités ;
  • Dans plusieurs cas, la police a fouillé les téléphones de manifestant·e·s, de militant·e·s et de journalistes. D’après l’examen de documents judiciaires, les juges ont parfois retenu à charge des informations récupérées sur des applications de messagerie privée pour étayer les accusations portées contre ces personnes, en plus de les poursuivre pour des commentaires publics sur Facebook ;
  • Au moins sept cybermilitant·e·s et manifestant·e·s pacifiques ont perdu leur emploi ou ont été licenciés par leur employeur du fait de leur inculpation ;
  • Les autorités judiciaires n’ont pas enquêté sur les plaintes déposées par deux militants du Hirak pour torture et mauvais traitements en détention.

Complément d’information

Le 22 février 2019, de grandes manifestations essentiellement pacifiques ont éclaté dans toute l’Algérie, s’opposant initialement au président de l’époque, Abdelaziz Bouteflika. Ce dernier ayant finalement décidé de se retirer, les revendications des manifestant·e·s ont ensuite porté sur un changement complet du système politique.

En décembre 2019, Abdelmadjid Tebboune a été élu président et a promis que son gouvernement allait « consolider la démocratie, l’état de droit et le respect des droits humains ».

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