Rapport annuel 2018

Maldives

République des Maldives
Chef de l’État et du gouvernement : Abdulla Yameen Abdul Gayoom

Cette année encore, les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique ont été réprimés. Les autorités ont utilisé le système pénal pour réduire au silence des opposants politiques, des défenseurs des droits humains, des journalistes et des membres de la société civile. Le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire demeurait un motif de préoccupation. Le président a réaffirmé que les exécutions reprendraient, après plus de 60 ans d’interruption.

SYSTÈME JUDICIAIRE

L’agitation politique a persisté alors que le président a eu recours à l’armée et au système judiciaire pour étouffer l’opposition. En juillet, celle-ci a introduit une motion de censure afin de destituer le président du Parlement, mais la procédure a été arrêtée après la suspension de quatre députés de l’opposition. Le 24 juillet, des parlementaires se sont vu refuser l’entrée au Parlement et le président a ordonné à l’armée d’utiliser du gaz poivre ainsi que du gaz lacrymogène pour les disperser. Les députés Faris Maumoon et Qasim Ibrahim ont été arbitrairement arrêtés au motif qu’ils auraient soudoyé des parlementaires dans le but de destituer le président du Parlement [1].

PROCÈS INÉQUITABLES

Les autorités n’ont pas tenu compte de certaines dispositions de la Constitution garantissant le droit à un procès équitable, comme l’a montré une série de poursuites pénales engagées contre des opposants politiques. Le 18 juillet, le député Faris Maumoon a été arrêté au cours d’une descente à son domicile pour avoir prétendument soudoyé des parlementaires afin qu’ils signent une motion de censure à l’encontre du président du Parlement. Il a tenté de faire abandonner les charges pesant sur lui, arguant que les éléments de preuves avaient été obtenus illégalement. En avril, Qasim Ibrahim, dirigeant du Parti républicain (Jumhooree Party), a été condamné à 38 mois d’emprisonnement après avoir été déclaré coupable, entre autres, de complot en vue de renverser le gouvernement. Après des demandes répétées, le tribunal a autorisé en septembre que Qasim Ibrahim se rende à l’étranger pour recevoir des soins médicaux.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

En avril, Yameen Rasheed, blogueur politique populaire et militant sur les réseaux sociaux, a été poignardé à mort dans l’immeuble où il vivait à Malé, la capitale [2]. L’année 2017 a marqué le troisième anniversaire de la disparition du journaliste Ahmed Rilwan. À la fin de l’année, les enquêtes menées sur ces cas n’avaient pas entraîné de poursuites contre les auteurs présumés. Elles ont par ailleurs été entachées d’ingérences politiques. En mars, des journalistes de Raajje TV ont signalé aux services de police des Maldives qu’ils avaient été menacés de mort s’ils envoyaient des journalistes sur l’atoll de Faafu pour couvrir la visite du roi d’Arabie saoudite. La police n’a mis en place aucune mesure de sécurité supplémentaire. À la même époque, deux journalistes travaillant au Maldives Independent ont été placés en détention par la police « pour assurer leur protection », après avoir reçu des menaces de la part de membres du parti au pouvoir. Ces journalistes ont affirmé que des policiers avaient lu leurs notes et les avaient traités comme des suspects. En juillet, sept journalistes des chaînes Sangu TV et Raajje TV ont été arrêtés alors qu’ils couvraient une manifestation à l’occasion de la fête de l’indépendance. Ils ont été détenus pendant plusieurs heures, accusés de résistance à des policiers.

LIBERTÉ DE RÉUNION

Cette année encore, des restrictions arbitraires ont été imposées à des manifestants pacifiques et à des défenseurs des droits humains. Le 24 juillet, l’armée a utilisé du gaz poivre et du gaz lacrymogène pour disperser des parlementaires qui essayaient d’entrer au Parlement. Le 8 août, une marche menée par des proches d’Ahmed Rilwan à l’occasion du troisième anniversaire de sa disparition a été interrompue par des membres des forces spéciales de la police, qui ont utilisé du gaz poivre, arraché des banderoles, détruit des pancartes et brièvement détenu neuf personnes. Quelques jours plus tard, le neveu d’Ahmed Rilwan et la soeur de Yameen Rasheed ont perdu leur poste au sein du personnel civil des services de police des Maldives pour avoir participé à la manifestation.

PEINE DE MORT

Le gouvernement a déclaré que des exécutions auraient lieu « d’ici fin septembre ». Ces exécutions seraient les premières dans le pays depuis plus de 60 ans. Trois hommes, Hussain Humaam Ahmed, Ahmed Murrath et Mohamed Nabeel, risquaient toujours d’être exécutés de manière imminente en dépit de sérieuses préoccupations quant à l’équité des procédures judiciaires les concernant. Des « aveux » d’Hussain Humaam Ahmed, obtenus, semble-t-il, sous la contrainte, ont notamment été utilisés, bien qu’il se soit rétracté par la suite. En 2016 et 2017, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a demandé à plusieurs reprises au gouvernement des Maldives de suspendre les exécutions de ces trois hommes, conformément aux engagements du pays en vertu du Protocole facultatif se rapportant au PIDCP [3]. Parmi les 17 prisonniers qui se trouvaient dans le quartier des condamnés à mort, cinq au moins avaient été condamnés pour des actes commis alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans [4].

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