« Le jugement très attendu de David Castillo, déclaré coupable de l’homicide de Berta Cáceres en tant que co-auteur, est une avancée importante vers la justice et est le résultat du travail sans relâche de la famille de Berta Cáceres et du COPINH en vue d’obtenir vérité, justice et réparations. Cependant, la justice ne sera complètement rendue pour Berta Cáceres que lorsque toutes les personnes impliquées dans le crime, y compris celles l’ayant commandité, seront traduites en justice », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
« Nous demandons instamment aux procureurs de continuer de chercher la vérité. Tant que tous les responsables ne seront pas amenés à rendre des comptes, d’autres défenseur·e·s des droits humains au Honduras continueront de perdre la vie pour avoir fait entendre leur voix et défendu les personnes vulnérables. Les autorités honduriennes doivent mettre fin à l’impunité. »
Le tribunal ayant prononcé la condamnation doit encore déterminer la peine de David Castillo, mais attend la résolution de précédents appels déposés par ses avocats. D’après le COPINH, la défense a déployé des tactiques dilatoires à plusieurs reprises, ralentissant les procédures judiciaires. Il a fallu presque un an à la justice pour prononcer les condamnations des sept personnes déclarées coupables de l’homicide de Berta Cáceres le 28 novembre 2018.
Pendant le procès de David Castillo, le tribunal n’a pas tenu compte des éléments de preuve que les avocats de la famille de Berta Cáceres avaient présentés contre d’autres personnes qui seraient impliquées dans son homicide. Le Groupe international d’experts (GAIPE), une équipe indépendante d’avocats embauchés par la famille de Berta Cáceres, a mis en lumière de graves failles dans l’enquête officielle de 2017. Son rapport contient des éléments de preuve qui impliqueraient dans ce crime des dirigeants d’entreprises et des responsables de l’État.
« Nous demandons instamment aux procureurs de continuer de chercher la vérité. Tant que tous les responsables ne seront pas amenés à rendre des comptes, d’autres défenseur·e·s des droits humains au Honduras continueront de perdre la vie pour avoir fait entendre leur voix et défendu les personnes vulnérables. Les autorités honduriennes doivent mettre fin à l’impunité »
Les défenseur·e·s des droits humains continuent d’être victimes d’attaques en toute impunité. Par exemple, quatre militants de la communauté garifuna et membres de l’Organisation fraternelle noire du Honduras (OFRANEH) ont été soumis à une disparition forcée par cinq personnes portant un gilet semblable à celui de la Direction des enquêtes de la police (DPI), le 18 juillet 2020. On ignore toujours où ils se trouvent. Avec 20 homicides enregistrés en 2020, le Honduras est le troisième pays le plus dangereux au monde pour les défenseur·e·s des droits humains, d’après le dernier rapport de Frontline Defenders [1]. Il s’agit également du pays le plus dangereux pour les défenseur·e·s des terres, des territoires et de l’environnement. Quatorze défenseur·e·s de l’environnement ont été tués dans le pays en 2019, faisant du Honduras le pays avec le taux d’homicides de défenseur·e·s de l’environnement par habitant le plus élevé au monde, d’après le rapport de 2020 de Global Witness [2].
Malgré ce contexte, le Honduras n’a pas signé l’Accord d’Escazú, premier traité sur les droits humains liés à l’environnement adopté en Amérique latine et aux Caraïbes, qui impose aux signataires de protéger les défenseur·e·s de l’environnement et est entré en vigueur le 22 avril 2021.
« Le gouvernement hondurien semble fermer les yeux lorsque des défenseur·e·s des droits humains sont attaqués, au lieu de respecter ses obligations de les protéger. Les autorités doivent prendre cela au sérieux et faire le nécessaire pour protéger les défenseur·e·s des droits humains, afin que des crimes comme le meurtre de Berta Cáceres ne se reproduisent jamais », a déclaré Erika Guevara-Rosas.
Complément d’information
Le 2 mars 2016, Berta Cáceres, courageuse défenseure de l’environnement et des droits des populations autochtones, a été abattue par des hommes de main à son domicile, dans la province d’Intibucá, au Honduras. Elle était coordinatrice du Conseil civique d’organisations indigènes et populaires du Honduras (COPINH) et faisait campagne contre la construction du barrage hydroélectrique d’Agua Zarca, qui menaçait les terres du peuple autochtone lenca.
Berta Cáceres et les autres membres du COPINH avaient déjà été victimes de menaces et d’agressions avant son meurtre et bénéficiaient de mesures conservatoires accordées par la Commission interaméricaine des droits de l’homme depuis le 29 juin 2009. Le 3 avril 2021, le COPINH a dénoncé l’arrestation de Berta et Laura Zúniga, les filles de Berta Cáceres, et de Camilo Bermúdez par la police nationale hondurienne à Santa Rosa de Copan, trois jours avant le début du procès de David Castillo.