Liban, inacceptable silence trois ans après l’explosion de Beyrouth

manifestants demandant justice et réparation après l'explosion de Beyrouth

En amont du troisième anniversaire de l’explosion catastrophique dans le port de Beyrouth qui a fait au moins 235 morts et détruit plus de la moitié de la ville, Aya Majzoub, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International, a déclaré :

« Les autorités libanaises ont eu trois ans pour enquêter sur les causes de l’explosion dévastatrice qui a eu lieu dans le port de Beyrouth, et pour amener les personnes soupçonnées d’avoir une responsabilité pénale à répondre de leurs actes. Pourtant, à ce jour, absolument personne n’a été amené à rendre de comptes pour cette tragédie du 4 août 2020.

Au lieu de cela, les autorités ont employé tous les moyens à leur disposition pour saper sans vergogne l’enquête menée au niveau national et y faire obstruction, afin de se protéger de toute obligation de rendre des comptes, et ainsi perpétuer la culture d’impunité dans le pays.

La communauté internationale a condamné à de nombreuses reprises l’interférence flagrante des autorités dans l’enquête nationale, notamment par le biais d’une déclaration conjointe au Conseil des droits de l’homme des Nations unies début 2023. Ce 3 août 2023, plus de 300 groupes libanais et internationaux de la société civile, ainsi que des rescapés et des familles de victimes, en appellent à nouveau [1] au Conseil des droits de l’homme afin qu’il mette en place de toute urgence une mission d’établissement des faits pour enquêter sur les causes de l’explosion de Beyrouth et pour identifier les responsables de cette catastrophe. »

Complément d’information

L’enquête menée au niveau national sur l’explosion du port de Beyrouth est suspendue depuis décembre 2021 en raison d’une série de recours juridiques déposés à l’encontre de l’enquêteur principal, le juge Tarek Bitar, et contre d’autres juges impliqués dans l’affaire, par des personnalités politiques qui étaient visées par l’enquête.

Lorsque le juge Tarek Bitar a tenté de reprendre l’enquête en janvier 2023, il a fait l’objet de poursuites judiciaires et d’une interdiction de voyager prononcées par le procureur Ghassan Oweidat, en charge de l’enquête sur le port. Ghassan Oweidat a ordonné la libération de toutes les personnes soupçonnées d’implication dans l’explosion qui étaient incarcérées. Au moins un des prévenus a fui le pays depuis.

Les actions de Ghassan Oweidat ont depuis été déclarées illégales par l’ordre des avocats de Beyrouth et par l’association des juges libanais. Cependant, il n’y a eu depuis lors aucune avancée de l’enquête, qui n’a toujours pas repris.

En mars 2023, l’Australie a présenté une déclaration conjointe au nom de 38 États auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations unies exprimant leur crainte que l’enquête nationale sur l’explosion n’ait été « entravée par une obstruction, des interférences et des intimidations systémiques, ainsi que par l’impasse politique ». La déclaration appelait les autorités libanaises à respecter leurs obligations internationales en matière de droits humains et à protéger l’indépendance de la justice. Elle demandait également l’ouverture d’une enquête transparente, crédible, impartiale, indépendante et rapide.

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